Par Lyes Akram
Abject,
le régime algérien moribond se dénude aux yeux du peuple, jour après jour. Loin
de l’obscurité, sa face parait hideuse et répugnante. Grace à Wikileaks, nous
savons que le livre de Benchicou, Journal d’un homme libre, qui, comme
l’indique son titre, n’est qu’un journal, a été interdit (et l’est encore) sur
ordre de Nourredine Zerhouni, le grand tortionnaire de la SM et génocidaire (un des
commanditaires de la tragédie du printemps noir en 2001), justement en vengeant la révélation de son passé de criminel par le même Benchicou. Trivial, cela
aide tout de même à parfaire la connaissance de la nature du régime algérien,
car les analyses des opposants et dissidents se trouvent ainsi confirmées
puisque on tient cette information d’une collaboratrice directe de Khalida
Toumi. Mais cette affaire, pour ce qui est de ses répercutions sur l’ensemble de la
nation Algérienne, est d’une petitesse infime par rapport à ce que nous
apprenons aujourd’hui.
L’effet Wikileaks
En
effet, « Mohamed Ghernaout nous a dit que la liquidation de Khalifa relève
d’un deal entre les dirigeants algériens et le renseignement français,
justement pour laisser le champ libre aux banques françaises en Algérie. Il
nous a dit aussi que Khalifa est devenu trop grand en un tout petit laps de
temps. Les Français, qui voulaient avoir leur part du gâteau, ont misé sur
l’imprudence du playboy Abdelmoumen pour appuyer leur thèse et faire tomber la
banque ». C’est ce que ressort d’un câble Wikileaks, tel que
rapporté par Le Soir d’Algérie, dans son édition d’aujourd’hui. Et c’est
l’ambassadeur américain Robert Ford qui commente. Voyant quelques années plus
tard que l’analyse de M. Ghernaout, expert financier Algérien, était
pertinente, l’ambassadeur le fait savoir à ses correspondants : « Sa
prophétie est devenue réalité. En ces dernières années, les banques françaises,
Société Générale et BNP Paribas qui ont ouvert plus de 50 succursales en
Algérie ont affiché leurs intentions à reprendre le Crédit populaire algérien
(CPA), listé parmi les sociétés privatisables ». Cette information à elle
seule suffit pour inciter les Algériens à réclamer la chute du régime et
vouloir ester les dirigeants qui ont planifié la ruine de Khalifa, pour
trahison. Combien d’Algériens ont perdu leurs épargnes dans cette
affaire ? Cette révélation ne va certainement pas les réjouir. Puis,
pour ne rien arranger, un diplomate britannique affirme : « Les
Algériens sont malhonnêtes au sujet de l’extradition d’Abdelmoumen Khalifa du
Royaume-Uni. Ils nous critiquent régulièrement à travers les colonnes de la
presse alors qu’ils n’ont jamais demandé officiellement son extradition ».
Voilà donc, en somme, la politique du régime : traiter les Algériens comme
des enfants, qui plus est débiles mentaux.
D’emblée,
je me pose une question : qui sont ces « dirigeants algériens »
qui collaborent avec le « renseignement français » ? Nous savons
que parmi les dirigeants il y a des civils et il y a aussi des militaires. Si
ce sont des civils, c’est-à-dire le sale capote du DRS et ses ramifications ou
les sécrétions du gang d’Oujda, on appelle cela en droit une « haute
trahison ». Et si c’est le renseignement algérien qui travaille contre
l’intérêt de l’Algérie main dans la main du renseignement français, alors c’est
kifkif, « haute trahison », avec la seule différence que, le
cas échéant, une institution devrait être dissoute, le DRS en l’occurrence,
devenue une matrice de traitres et un danger sur la nation Algérienne.
Néanmoins,
nous savons que le régime protègera ses sbires et hommes liges et n’en
sacrifiera aucun que si la pression populaire augmente, ce qui, présentement,
n’est malheureusement pas le cas – et bientôt cela va changer. Quoi qu’il en
soit, les révélations en cours participent grandement dans la conscientisation
de l’opinion publique algérienne. On peut leurrer tout le monde pendant un
certain temps, ou quelques uns tout le temps, mais nul ne peut leurrer tout le
monde tout le temps, dit la sagesse. Et le régime algérien n’est point exception.
De
jour en jour, on perçoit la hausse de l’implication des Algériens dans la chose
politique, ce qui est déjà un accomplissement en soi. Le régime travaille via
son système scolaire et ses organes de propagande, composés de
journalistaillons vendus et autres laquais lèches-chèque, à abrutir le peuple,
mais, désormais, ces deux piliers qui, jadis, avaient fait des ravages
incommensurables, ne suffiront plus.
Al-Jazeera et Internet au service des peuples
Il
y a de cela seulement quelques années, l’Algérien moyen n’avait pas trop de
choix. A cause du prix exorbitant des livres et, avec son avènement, de
l’abonnement Internet, l’Algérien ne pouvait assouvir convenablement sa soif
intellectuelle. Formé dans une école au
demeurant médiocre où les matières scientifiques ont besoin d’une mise à jour,
les sciences humaines absentes et l’Histoire enseignée est falsifiée,
l’Algérien était certes endoctriné. Par surcroit, la presse était directement
dirigée par les hommes du pouvoir en place. Les dirigeants, qui étaient tous
francophones, savaient que le legs de la France dans le domaine scolaire était suffisant
pour produire des « citoyens » alors qu’ils eurent (et ont) surtout besoin de
« sujets » ; ils avaient ainsi décidé dans la précipitation une
politique d’arabisation qui a nuit avant tout à la langue arabe. Réprimer à
l’intérieur y compris par des avions militaires, faire des coups d’Etat,
n’avaient pas des conséquences graves, comme ils auraient dû, sur le plan
international, à cause ou de la complicité directe ou indirecte de l’Occident,
ou de la culpabilisation postcoloniale…
Aujourd’hui,
la situation me parait radicalement modifiée. D’un coté, l’école est certes
assez médiocre et la presse est au service du régime, hormis quelques exceptions,
mais, de l’autre, ce régime n’a plus le monopole. On doit beaucoup à Al-Jazeera
qui a donné une nouvelle place à la télévision dans les familles algériennes.
On peut dire sans crainte qu’elle a limité un peu les dégâts de la télévision.
Car la télévision a en général des effets négatifs, telle la paresse, la
passivité et autres. Internet est en train de corriger cela. Contrairement au
téléspectateur qui s’assied dans son fauteuil en sa qualité de récepteur des
informations, qui reçoit les analyses des intellectuels invités des plateaux de
télévision selon des critères flous, l’internaute, quant à lui, est actif, il est
en interaction avec l’information et ils discutent les analyses. A cause de la
télévision, le taux de lecture avaient assurément baissé. Avec Internet, la
lecture, qui n’est pas à confondre avec la vente des livres, ne peut
qu’augmenter. Les internautes lisent des ebooks facilement téléchargeables et
des articles, écrivent des textes, deviennent des bloggeurs et diffusent
eux-mêmes des informations, écrivent des commentaires, contactent et même débattent
les écrivains « traditionnels », refusent certains théories,
dénoncent certains thèses, en revendiquent d’autres, etc. Aux Etats-Unis, on
parle du cinquième pouvoir, le quatrième étant la presse. L’Algérie n’est pas
restée en dehors de cette véritable révolution.
Que dire de la langue ? Il fut une époque où l’élite était francophone en Algérie et le peuple arabophone. Parmi le peuple, certains avaient même honte d’être exclusivement arabophones. Aujourd’hui, et « paradoxalement, car c’est après le départ de la France, note Emmanuel Todd, les Algériens sont de plus en plus bilingues ». Ainsi, ni arabophones ni francophones : pourquoi limiter son horizon alors que le cerveau d’un enfant de cinq ou six ans peut maitriser jusqu’à cinq langues ? En Algérie, ce n’est pas seulement à l’école, mais aussi à Al-Jazeera que l’on doit l’utilisation de la langue arabe. Même l’anglais commence à avoir une place ; il n’y a qu’à lire le langage utilisé par les Facebookers algériens lorsqu’ils discutent entre eux pour noter cela. En un mot, le monde change, et c’est une métamorphose qui touche aussi l’Algérie. Le régime et ses outils son dépassé et de très loin.
Que dire de la langue ? Il fut une époque où l’élite était francophone en Algérie et le peuple arabophone. Parmi le peuple, certains avaient même honte d’être exclusivement arabophones. Aujourd’hui, et « paradoxalement, car c’est après le départ de la France, note Emmanuel Todd, les Algériens sont de plus en plus bilingues ». Ainsi, ni arabophones ni francophones : pourquoi limiter son horizon alors que le cerveau d’un enfant de cinq ou six ans peut maitriser jusqu’à cinq langues ? En Algérie, ce n’est pas seulement à l’école, mais aussi à Al-Jazeera que l’on doit l’utilisation de la langue arabe. Même l’anglais commence à avoir une place ; il n’y a qu’à lire le langage utilisé par les Facebookers algériens lorsqu’ils discutent entre eux pour noter cela. En un mot, le monde change, et c’est une métamorphose qui touche aussi l’Algérie. Le régime et ses outils son dépassé et de très loin.
Vers la chute finale du régime
Avec
la fin d’El Guedhaffi, le sort du régime en Algérie dépend à mon sens, avec la
conscientisation de la population en cours, de deux autres éléments extérieurs.
D’abord de l’évolution de la situation en Libye, puisque El Guedhaffi est
introuvable et certaines localités certes minuscules sont encore pro-régime.
Voir le dénouement du problème libyen encouragera les Algériens, en réfutant
les dires des propagandistes du régime. L’autre élément est de taille, car,
historiquement, l’Algérie et le Maroc ont toujours eu des destinées
inextricablement liées. En effet, la situation au Maroc est d’une grande
influence sur l’Algérie. Le roi du Maroc ne parait pas avoir l’intention de
massacrer son peuple comme Assad en Syrie, et, s’il cède à une véritable
réforme institutionnelle, ou, sinon, si le régime tombe comme les trois autres,
il sonnera par conséquent immanquablement le glas du régime algérien, qu’il le
veuille ou pas.
A
l’intérieur de l’Algérie, la conscientisation avance à pas sûrs, la situation
s’améliore d’une manière très perceptible. Lorsque l’on vit ce que les
sociologues et les historiens appellent une « situation
révolutionnaire », très bientôt en Algérie, les conséquences des actions
changent. Ce que jadis parait insensé, futile, déplacé, car sans effet, sans
aucune portée, parce que tout simplement il n’a pas mobilisé, comme les appels
des vrais opposants du régime algérien depuis 1962 qui étaient restés sans
résonance, deviendra, soudainement en situation révolutionnaire, un acte brave,
audacieux et, surtout, il deviendra un exemple. Puisque en période
révolutionnaire, affirme Kropotkine, « le courage, le dévouement, l’esprit
de sacrifice, sont aussi contagieux que la poltronnerie, la soumission et la
panique » en situation de servitude.
Le
temps des paroles, des textes, le temps de la conscientisation, est ce qu’a
vécu l’Algérie depuis des décennies et jusqu’à présent. Actuellement, la prise
de conscience s’accélère. Ces paroles ne tarderont pas à se transformer en
actions. Et, comme c’est le cas depuis toujours, l’on ne devrait pas s’attendre
à 36 millions de révolutionnaires Algériens. Etre révolutionnaire n’est pas
chose aisée. En Egypte, à peine un dixième du peuple est sorti réclamer la
chute du plus féroce des régimes arabes et il a réussi. Et, comme on le voit
aujourd’hui sur les écrans, il y avait même des gens qui adulaient le rais
pourtant pourri, adulation réellement pathologique tel un syndrome de
Stockholm. Mais leurs voix ne comptent plus lorsque le vase est débordé.
En
Algérie, les minorités qui activent actuellement ne doivent ni se lasser, ni
désespérer s’ils ne voient pas l’aboutissement de leurs actions immédiatement.
« Il faut semer même dans le désert, affirme Dr Moncef Merzouki ».
S’il pleut, il y aura de la verdure, sinon les graines restent ! Car,
comme le soutien Kropotkine en bon analyste des processus révolutionnaires, c’est
toujours « l’action, l’action continue, renouvelée sans cesse, des
minorités, qui opère cette transformation » de la soumission chez le
peuple en courage et dévouement. Le fruit pourrit, et le régime va couler, les
Algériens ne semblent plus prêts à souffrir en silence, ni à méditer sur la
ruine de la nation sans réagir.
Selon
les dernières nouvelles, les dirigeants algériens ont commencé à transférer
leurs fortunes illégitimes de l’Europe vers d’autres pays plus « sûrs ».
Proche, la fin du régime algérien sera certes tragique à tous ses sbires et les
traitres, ces agents qu’il allaite avec notre argent.
Par
Lyes Akram
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