mardi 6 septembre 2011

Algérie : Le fruit pourrit, le régime va couler


Par Lyes Akram

Abject, le régime algérien moribond se dénude aux yeux du peuple, jour après jour. Loin de l’obscurité, sa face parait hideuse et répugnante. Grace à Wikileaks, nous savons que le livre de Benchicou, Journal d’un homme libre, qui, comme l’indique son titre, n’est qu’un journal, a été interdit (et l’est encore) sur ordre de Nourredine Zerhouni, le grand tortionnaire de la SM et génocidaire (un des commanditaires de la tragédie du printemps noir en 2001), justement en vengeant la révélation de son passé de criminel par le même Benchicou. Trivial, cela aide tout de même à parfaire la connaissance de la nature du régime algérien, car les analyses des opposants et dissidents se trouvent ainsi confirmées puisque on tient cette information d’une collaboratrice directe de Khalida Toumi. Mais cette affaire, pour ce qui est de ses répercutions sur l’ensemble de la nation Algérienne, est d’une petitesse infime par rapport à ce que nous apprenons aujourd’hui.

 L’effet Wikileaks
En effet, « Mohamed Ghernaout nous a dit que la liquidation de Khalifa relève d’un deal entre les dirigeants algériens et le renseignement français, justement pour laisser le champ libre aux banques françaises en Algérie. Il nous a dit aussi que Khalifa est devenu trop grand en un tout petit laps de temps. Les Français, qui voulaient avoir leur part du gâteau, ont misé sur l’imprudence du playboy Abdelmoumen pour appuyer leur thèse et faire tomber la banque ». C’est ce que ressort d’un câble Wikileaks, tel que rapporté par Le Soir d’Algérie, dans son édition d’aujourd’hui. Et c’est l’ambassadeur américain Robert Ford qui commente. Voyant quelques années plus tard que l’analyse de M. Ghernaout, expert financier Algérien, était pertinente, l’ambassadeur le fait savoir à ses correspondants : « Sa prophétie est devenue réalité. En ces dernières années, les banques françaises, Société Générale et BNP Paribas qui ont ouvert plus de 50 succursales en Algérie ont affiché leurs intentions à reprendre le Crédit populaire algérien (CPA), listé parmi les sociétés privatisables ». Cette information à elle seule suffit pour inciter les Algériens à réclamer la chute du régime et vouloir ester les dirigeants qui ont planifié la ruine de Khalifa, pour trahison. Combien d’Algériens ont perdu leurs épargnes dans cette affaire ? Cette révélation ne va certainement pas les réjouir. Puis, pour ne rien arranger, un diplomate britannique affirme : « Les Algériens sont malhonnêtes au sujet de l’extradition d’Abdelmoumen Khalifa du Royaume-Uni. Ils nous critiquent régulièrement à travers les colonnes de la presse alors qu’ils n’ont jamais demandé officiellement son extradition ». Voilà donc, en somme, la politique du régime : traiter les Algériens comme des enfants, qui plus est débiles mentaux.
D’emblée, je me pose une question : qui sont ces « dirigeants algériens » qui collaborent avec le « renseignement français » ? Nous savons que parmi les dirigeants il y a des civils et il y a aussi des militaires. Si ce sont des civils, c’est-à-dire le sale capote du DRS et ses ramifications ou les sécrétions du gang d’Oujda, on appelle cela en droit une « haute trahison ». Et si c’est le renseignement algérien qui travaille contre l’intérêt de l’Algérie main dans la main du renseignement français, alors c’est kifkif,  « haute trahison », avec la seule différence que, le cas échéant, une institution devrait être dissoute, le DRS en l’occurrence, devenue une matrice de traitres et un danger sur la nation Algérienne.
Néanmoins, nous savons que le régime protègera ses sbires et hommes liges et n’en sacrifiera aucun que si la pression populaire augmente, ce qui, présentement, n’est malheureusement pas le cas – et bientôt cela va changer. Quoi qu’il en soit, les révélations en cours participent grandement dans la conscientisation de l’opinion publique algérienne. On peut leurrer tout le monde pendant un certain temps, ou quelques uns tout le temps, mais nul ne peut leurrer tout le monde tout le temps, dit la sagesse. Et le régime algérien n’est point exception.
De jour en jour, on perçoit la hausse de l’implication des Algériens dans la chose politique, ce qui est déjà un accomplissement en soi. Le régime travaille via son système scolaire et ses organes de propagande, composés de journalistaillons vendus et autres laquais lèches-chèque, à abrutir le peuple, mais, désormais, ces deux piliers qui, jadis, avaient fait des ravages incommensurables, ne suffiront plus.

Al-Jazeera et Internet au service des peuples
Il y a de cela seulement quelques années, l’Algérien moyen n’avait pas trop de choix. A cause du prix exorbitant des livres et, avec son avènement, de l’abonnement Internet, l’Algérien ne pouvait assouvir convenablement sa soif intellectuelle.  Formé dans une école au demeurant médiocre où les matières scientifiques ont besoin d’une mise à jour, les sciences humaines absentes et l’Histoire enseignée est falsifiée, l’Algérien était certes endoctriné. Par surcroit, la presse était directement dirigée par les hommes du pouvoir en place. Les dirigeants, qui étaient tous francophones, savaient que le legs de la France dans le domaine scolaire était suffisant pour produire des « citoyens » alors qu’ils eurent (et ont) surtout besoin de « sujets » ; ils avaient ainsi décidé dans la précipitation une politique d’arabisation qui a nuit avant tout à la langue arabe. Réprimer à l’intérieur y compris par des avions militaires, faire des coups d’Etat, n’avaient pas des conséquences graves, comme ils auraient dû, sur le plan international, à cause ou de la complicité directe ou indirecte de l’Occident, ou de la culpabilisation postcoloniale…
Aujourd’hui, la situation me parait radicalement modifiée. D’un coté, l’école est certes assez médiocre et la presse est au service du régime, hormis quelques exceptions, mais, de l’autre, ce régime n’a plus le monopole. On doit beaucoup à Al-Jazeera qui a donné une nouvelle place à la télévision dans les familles algériennes. On peut dire sans crainte qu’elle a limité un peu les dégâts de la télévision. Car la télévision a en général des effets négatifs, telle la paresse, la passivité et autres. Internet est en train de corriger cela. Contrairement au téléspectateur qui s’assied dans son fauteuil en sa qualité de récepteur des informations, qui reçoit les analyses des intellectuels invités des plateaux de télévision selon des critères flous, l’internaute, quant à lui, est actif, il est en interaction avec l’information et ils discutent les analyses. A cause de la télévision, le taux de lecture avaient assurément baissé. Avec Internet, la lecture, qui n’est pas à confondre avec la vente des livres, ne peut qu’augmenter. Les internautes lisent des ebooks facilement téléchargeables et des articles, écrivent des textes, deviennent des bloggeurs et diffusent eux-mêmes des informations, écrivent des commentaires, contactent et même débattent les écrivains « traditionnels », refusent certains théories, dénoncent certains thèses, en revendiquent d’autres, etc. Aux Etats-Unis, on parle du cinquième pouvoir, le quatrième étant la presse. L’Algérie n’est pas restée en dehors de cette véritable révolution.
Que dire de la langue ? Il fut une époque où l’élite  était francophone en Algérie et le peuple arabophone. Parmi le peuple, certains avaient même honte d’être exclusivement arabophones. Aujourd’hui,  et « paradoxalement, car c’est après le départ de la France, note Emmanuel Todd, les Algériens sont de plus en plus bilingues ». Ainsi, ni arabophones ni francophones : pourquoi limiter son horizon alors que le cerveau d’un enfant de cinq ou six ans peut maitriser jusqu’à cinq langues ? En Algérie, ce n’est pas seulement à l’école, mais aussi à Al-Jazeera que l’on doit l’utilisation de la langue arabe. Même l’anglais commence à avoir une place ; il n’y a qu’à lire le langage utilisé par les Facebookers algériens lorsqu’ils discutent entre eux pour noter cela. En un mot, le monde change, et c’est une métamorphose qui touche aussi l’Algérie. Le régime et ses outils son dépassé et de très loin.


Vers la chute finale du régime
Avec la fin d’El Guedhaffi, le sort du régime en Algérie dépend à mon sens, avec la conscientisation de la population en cours, de deux autres éléments extérieurs. D’abord de l’évolution de la situation en Libye, puisque El Guedhaffi est introuvable et certaines localités certes minuscules sont encore pro-régime. Voir le dénouement du problème libyen encouragera les Algériens, en réfutant les dires des propagandistes du régime. L’autre élément est de taille, car, historiquement, l’Algérie et le Maroc ont toujours eu des destinées inextricablement liées. En effet, la situation au Maroc est d’une grande influence sur l’Algérie. Le roi du Maroc ne parait pas avoir l’intention de massacrer son peuple comme Assad en Syrie, et, s’il cède à une véritable réforme institutionnelle, ou, sinon, si le régime tombe comme les trois autres, il sonnera par conséquent immanquablement le glas du régime algérien, qu’il le veuille ou pas.
A l’intérieur de l’Algérie, la conscientisation avance à pas sûrs, la situation s’améliore d’une manière très perceptible. Lorsque l’on vit ce que les sociologues et les historiens appellent une « situation révolutionnaire », très bientôt en Algérie, les conséquences des actions changent. Ce que jadis parait insensé, futile, déplacé, car sans effet, sans aucune portée, parce que tout simplement il n’a pas mobilisé, comme les appels des vrais opposants du régime algérien depuis 1962 qui étaient restés sans résonance, deviendra, soudainement en situation révolutionnaire, un acte brave, audacieux et, surtout, il deviendra un exemple. Puisque en période révolutionnaire, affirme Kropotkine, « le courage, le dévouement, l’esprit de sacrifice, sont aussi contagieux que la poltronnerie, la soumission et la panique » en situation de servitude.
Le temps des paroles, des textes, le temps de la conscientisation, est ce qu’a vécu l’Algérie depuis des décennies et jusqu’à présent. Actuellement, la prise de conscience s’accélère. Ces paroles ne tarderont pas à se transformer en actions. Et, comme c’est le cas depuis toujours, l’on ne devrait pas s’attendre à 36 millions de révolutionnaires Algériens. Etre révolutionnaire n’est pas chose aisée. En Egypte, à peine un dixième du peuple est sorti réclamer la chute du plus féroce des régimes arabes et il a réussi. Et, comme on le voit aujourd’hui sur les écrans, il y avait même des gens qui adulaient le rais pourtant pourri, adulation réellement pathologique tel un syndrome de Stockholm. Mais leurs voix ne comptent plus lorsque le vase est débordé.
En Algérie, les minorités qui activent actuellement ne doivent ni se lasser, ni désespérer s’ils ne voient pas l’aboutissement de leurs actions immédiatement. « Il faut semer même dans le désert, affirme Dr Moncef Merzouki ». S’il pleut, il y aura de la verdure, sinon les graines restent ! Car, comme le soutien Kropotkine en bon analyste des processus révolutionnaires, c’est toujours « l’action, l’action continue, renouvelée sans cesse, des minorités, qui opère cette transformation » de la soumission chez le peuple en courage et dévouement. Le fruit pourrit, et le régime va couler, les Algériens ne semblent plus prêts à souffrir en silence, ni à méditer sur la ruine de la nation sans réagir.
Selon les dernières nouvelles, les dirigeants algériens ont commencé à transférer leurs fortunes illégitimes de l’Europe vers d’autres pays plus « sûrs ». Proche, la fin du régime algérien sera certes tragique à tous ses sbires et les traitres, ces agents qu’il allaite avec notre argent.

Par Lyes Akram

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