mardi 18 octobre 2011

Les centres de décision s’entre-déchirent : La guerre de succession a-t-elle commencé?


Par Hacen Ouali
Les rumeurs récurrentes sur la maladie du Président et son manque d’initiative continuent à bloquer le pays. Pour plusieurs analystes, l’agitation qui s’empare du sérail est le signe qu’une guerre de succession a commencé. Lutte d’appareils au sein du parti FLN, cafouillage au Parlement autour des projets de loi portant sur «les réformes», réveil soudain «d’acteurs» politiques alliés du pouvoir pour vilipender des pontes du régime. Subitement, le cénacle semble s’agiter. La guerre de succession à Bouteflika a-t-elle commencé ?
L’approche des élections législatives explique en partie cette agitation qui se déroule à «la périphérie du pouvoir». Le tohu-bohu, dont le Parlement est le théâtre, est la réplique à une guerre de tranchées au sommet du régime. Certains observateurs n’hésitent pas à évoquer «la vacance du pouvoir» liée à l’état de santé du Président. Les signes d’une course prématurée à la succession au Président sortant sont de plus en plus apparents. Une hypothèse que défend le politologue Rachid Grim : «Certainement que la gravité de sa maladie empêche le Président d’être réellement présent sur la scène politique. C’est une cacophonie qui sent très fort la fin d’un règne. Je pense que toute l’agitation que l’on constate actuellement au niveau du sérail politique a pour origine la succession ouverte du président de la République ainsi que la proximité des élections législatives de 2012.» Toujours selon R. Grim, cet état de fait donne l’impression que «beaucoup d’acteurs du pouvoir, et non des moindres, en profitent pour faire avancer les choses à leur propre profit ou au profit de la ligne politique qu’ils défendent». Une succession anticipée est-elle alors plausible ? «Peut-être», répond Rachid Grim. «La maladie du Président, conjuguée à l’abandon du projet de succession familiale et à l’impossibilité d’un quatrième mandat, le Printemps arabe étant passé par là, ont fait que la voie d’une succession – à l’intérieur du sérail – est ouverte. Peut-être même avant l’échéance du mandat présidentiel actuel», présage-t-il encore. Notre politologue fonde son analyse sur un certain nombre d’éléments qui s’agrègent : «La succession, par une importante frange du parti, n’a pas d’autre explication. Tout le monde se positionne, les partis comme les individus. Mais c’est avant tout le FLN qui s’agite, parce qu’il y a de nombreuses tentatives de remettre en cause sa légitimité. Et c’est comme cela qu’il convient d’analyser le retour en force de la formule ‘le FLN au musée de l’histoire’.» Cela signifie, de l’avis de R. Grim, qu’une frange importante du pouvoir «se méfie d’une succession à travers le FLN actuel et son patron qui placerait le pays sur la voie d’une islamisation encore plus importante que celle qu’elle emprunte actuellement. Cette frange ne veut pas que le FLN officiel soit le vainqueur de la prochaine législature, ce qui mettrait son chef en pole position pour la future présidentielle». Les attaques dont fait l’objet Abdelaziz Belkhadem n’ont pour but que «de le disqualifier et d’empêcher son ambition présidentielle de se concrétiser». Le patron du RND, Ahmed Ouyahia, qui, lui aussi, se voit dans la peau du prochain président de la République, «prépare avec soin les prochaines échéances», estime Rachid Grim. De par son fonctionnement opaque et sa nature autoritaire, le régime s’affaire à organiser une alternance à l’intérieur du système sans l’association des Algériens. «Cette succession interne et clandestine est une salade assaisonnée au goût du pouvoir en place ; le peuple, lui, est tenu à l’écart», déclare le professeur des sciences politiques, Ahmed Rouadjia. Cependant, «le pouvoir est pris de panique générale liée à des lendemains incertains et à une situation internationale qui n’est pas en sa faveur. Et si les crises au sein du régime sont récurrentes, il n’en demeure pas moins que les différents groupes qui le composent, pour des raisons de survie et de maintien de leurs intérêts, s’entendent», dissèque A. Rouadjia. Pour lui, le pouvoir, qui «s’est accommodé de coups d’Etat et de rafistolage depuis l’indépendance, a déjà sous la main un ou deux successeurs à Bouteflika et les plans sont prêts». Bien évidemment, les préoccupations politiques et sociales des Algériens «ne sont pas intégrées dans les plans du pouvoir», juge-t-il. En somme, pendant que le régime s’arrange par la ruse, le truchement et la force pour se maintenir, l’Algérie, et avec elle la majorité des Algériens, est enfermée dans un autoritarisme aux fâcheuses conséquences. Un demi-siècle après l’indépendance, l’âge mûr d’une nation, le pays est exposé à tous les dangers par la faute d’une caste dirigeante dont le seul souci est de demeurer aux commandes. 

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